Le chantier scientifique de Notre-Dame de Paris

Une exposition sur un chantier exceptionnel

Suite à l'incendie du 15 avril 2019 et les travaux de reconstruction immédiatement entrepris, la cathédrale Notre-Dame de Paris a fait l'objet d'une étude approfondie et inédite durant les 3 années précédant sa réouverture.

A l'occasion de la clôture de ce chantier, l'Université de la Sorbonne University Abu Dhabi a organisé le 26 février 2024 une série de conférences et une exposition en partenariat avec l'établissement public en charge de la conservation et de la restauration de Notre-Dame de Paris. Ces évènements s'inscrivent dans le cadre des manifestations culturelles qui précèdent la réouverture de la cathédrale en décembre 2024.

On pouvait suivre le déroulé des travaux de sécurisation et de recherche à travers des photos de l'agence Magnum Photo, des relevés de signes lapidaires et une mise en valeur des apports de la numérisation au sein du chantier.

Au centre de l'exposition, un chapiteau original du XIIIème siècle était mis en valeur par un dispositif holographique inédit.

Les numérisations de la cathédrale

Pour cette exposition, ce sont les modèles 3D créés par le Groupe de Travail Décor qui sont mis en avant. Réalisés principalement par photogrammétrie et lasergrammétrie par la plateforme PLEMO 3D, au sein du centre André Chastel, Faculté des Lettres Sorbonne Université.

Profitant des échaffaudages montés dans le cadre de la reconstruction de la cathédrale Notre-Dame de Paris, ces relevés 3D ont pu être réalisés sur des parties architecturales encore inaccessibles jusqu'à présent. Ces procédés permettent la numérisation très précise d'un objet donné en modèle 3D grâce à la prise de nombreuses photos sous tous les angles de celui-ci.

Ainsi, divers chapiteaux, bustes ou encore clés de voûtes, ont pu être dupliqués numériquement et implementés dans une base de donnée eCorpus. Ces modèles ont été rendus accessibles lors de l'exposition, dévoilant sous toutes leurs coutures ces décors monumentaux cachés du grand public grâce aux explications et travaux d'analyses des chercheurs et des historiens.

Ces présentatons interactives étaient disponibles sur place dans l'exposition à travers un système d'affichage holographique tactile utilisant eCorpus comme moteur de visualisation.

Un projet de valorisation scientifique

Travaux de préparation des modèles 3D grâce à une reproduction à l'échelle d'un fragment de chapiteau

A l'occasion de l'exposition aux Emirats Arabes Unis, le fragment de chapiteau a été sorti de l'ombre pour être installé aux yeux de tous dans l'atrium de la Sorbonne University Abu Dhabi. L'installation d'un mapping holographique par Holusion a pu permettre une superposition du fragment réel avec sa reconstitution numérique, donnant une nouvelle jeunesse à ce morceau d'Histoire.

Ce fragment provient d'un chapiteau installé au Moyen-Âge, lors de la construction de la cathédrale, dans les tribunes de la nef. Il faisait parti d'un ensemble de colonettes tout le long de la nef qu'on aperçoit encore aujourd'hui en levant les yeux au dessus de piliers massifs de cette allée centrale.

Lors des restaurations du monument par Viollet-le-Duc au XIXème siècle, de nombreux élements architecturaux furent démontés et remplacés par l'architecte de Napoléon III. Ce chapiteau en particulier, probablement abîmé par le temps, fut démonté à cette occasion et placé en exposition dans les jardins adjacents.

Dans la seconde moitié du XXème siècle, la prise de conscience pour la préservation de ce patrimoine a permis sa mise à l'abri et sa protection au sein même du monument. Sa numérisation par PLEMO 3D fin 2023 a permis de fournir les données nécessaires pour identifier les élements manquants avec l'aide des chercheurs de la Sorbonne de Paris et de l'Université de Lille. Grâce à leurs travaux, il a été possible de réaliser une copie à l'échelle en impression 3D et lancer ce projet de mapping holographique.

Tympan de la porte rouge avec hypothèses de colorations

Rendre visibles les travaux d'analyse scientifique

Durant les travaux de restauration de la cathédrale Notre-Dame de Paris, les chercheurs du Laboratoire de Recherche des Monuments Historiques (LRMH) ont réalisé des avancées significatives dans l' étude de la polychromie présente sur le tympan de la Porte rouge. La polychromie, qui consiste en l'application sur des œuvres architecturale de couches de couleurs composées de pigments et de liants, est extrêmement fragile et se dégrade avec le temps. Bien que des traces de ces couches subsistent, il est presque impossible d'envisager les couleurs d'origine du tympan dans son unité.

Les prélèvements réalisés, au nombre d'une dizaine, sont si infimes qu'ils n'endommagent pratiquement pas l'œuvre originale. En revanche, ils fournissent une mine d'informations sur les composés chimiques constituant les pigments et les multiples couches picturales déposées sur la pierre calcaire. En s'appuyant sur la photogrammétrie réalisée par PLEMO 3D, Holusion a créé une reconstitution de cette polychromie, basée sur les différents pigments retrouvés. Une vidéo de présentation valorisant ces recherches inédites a ensuite été diffusée sur une borne holographique lors de l'exposition et a servi à illustrer une publication scientifique.

Commandée par saint Louis au XIIIe siècle, la porte rouge permet aux chanoines de passer directement du cloître au chœur de la Cathédrale et doit son nom à la couleur de ses vantaux. Saint Louis est représenté sur le tympan à gauche de la Vierge, couronnée par un ange. Marguerite de Provence, l'épouse de Saint Louis est placée à droite du Christ.

Un travail de restauration 3D

Oculus reconstitué en 3D lors de l'exposition à la Sorbonne Universityu Abu Dhabi

Durant les numérisations des réserves, des fragments d'anciens oculi furent numérisés Ces ouvertures en pierre furent installées durant la construction même de la cathédrale, puis retirées peu de temps après, toujours durant la construction de cette-dernière, pour agrandir les ouvertures des fenêtres.

Ces fragments, épauffrés et lapidaires, ont été numérisés via un procédé de lasergrammetrie par PLEMO 3D. A partir de ces numérisations, et aidé par des chercheurs de PLEMO 3D, de l'IRHiS et d'un rapport de Chantal Hardy, Holusion a proposé des reconstitutions numériques, vraissemblables et inédites de ces pièces architecturales oubliées.

A l'occasion de l'exposition Abou Dabi, trois modèles d'oculi, provenant de la nef et du choeur et ont pu être présentés en montrant en supperposition l'anastylose de l'élèment et les scans des fragments qui les composent.

L'inauguration de l'exposition et les conférences

Remerciements et crédits

  • Delphine Syvilay : Sorbonne University Abu Dhabi
  • Jonathan Truillet : Etablissement Public Rebâtir Notre-Dame de Paris
  • Dany Sandron : Faculté des Lettres de Sorbonne Université
  • Grégory Chaumet : Faculté des Lettres de Sorbonne Université
  • Stéphanie Duchêne : LRMH
  • Elise Baillieul : Faculté des Humanités, Université de Lille
  • Marc Gil : Faculté des Humanités, Université de Lille

Suite du projet : Une exposistion au Musée Cluny à Paris du 19 novembre 2024 au 16 mars 2025 à découvrir dans cet article : Faire parler les pierres